Page:Gagnebin - Petite Nell, 1902.djvu/59

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— Oh ! sœur Hélène, il ne viendra pas, il ne peut pas venir.

Mlle Steinwardt s’était levée en pâlissant.

— Est-il malade, dites, ma chérie, comment, par qui l’avez-vous appris ?

— C’est lui qui m’écrit… pour me dire… qu’il a accepté une place de précepteur ; il voyagera tout l’été, il ira en Suède, en Norvège, en Finlande ; et moi qui l’attends depuis si longtemps, je ne le verrai pas.

— Pauvre Petite Nell, cela me fait beaucoup, beaucoup de peine pour vous. Je comprends si bien votre chagrin, mais ma chérie, en y réfléchissant, il me semble pourtant qu’il n’a pas si mal agi, il emploiera utilement ses vacances, tandis qu’ici…

Petite Nell releva vivement la tête.

— Oh ! sœur Hélène, si vous étiez, comme moi, toujours séparée de ce que vous aimez le plus au monde, vous me plaindriez, mais vous ne savez pas ce que c’est, vous…

Elle s’arrêta, son amie la regardait d’un air étrange.

— Moi, murmura-t-elle, je ne sais pas ce que c’est, oh ! Petite Nell, comme vous vous trompez, comme vous êtes injuste et cruelle sans le vouloir.

— Pardonnez-moi, murmura la fillette en se rapprochant, je ne savais pas, sœur Hélène, pardonnez-moi !

Mais sœur Hélène ne semblait pas l’entendre, elle demeurait immobile, les yeux fermés, la tête appuyée sur sa main.

— Je voudrais vous dire quelque chose, murmura-t-elle enfin, mais je ne sais pas si j’en ai le courage,