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III

Lille est la cité industrielle la plus importante du nord de la France. Là, comme dans tous les centres de grande industrie, l’économiste est frappé du contraste choquant que présente l’opulence et l’excès de la misère.

C’est une triste, mais inévitable conséquence de notre ère de féodalité industrielle. L’application des forces mécaniques à l’industrie, dont le résultat ultérieur sera certainement pour l’homme l’affranchissement de tout travail dégradant ou pénible, le place aujourd’hui dans un esclavage plus douloureux qu’autrefois le travail isolé.

L’homme, confondu pour ainsi dire avec la machine, qu’il sert en instrument plutôt passif qu’intelligent, ne prenant à son travail, ordinairement divisé à l’extrême, qu’un intérêt secondaire, s’atrophie peu à peu, et ses instincts moraux s’affaiblissent d’autant plus aisément que son intelligence est plus annihilée.

Dans la manufacture l’homme perd sa liberté. Il est caserné en quelque sorte et placé jusqu’à un certain point sous l’autorité arbitraire du patron.

Sans doute cette féodalité n’a pas à beaucoup près des résultats aussi abusifs, aussi désastreux que jadis la féo-