Page:Gagneur - Le Calvaire des femmes 1.djvu/34

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— Je vous en prie, Bathilde, s’écria avec indignation Mme Borel, ne dites pas devant mes filles des choses semblables !

— Vos filles sont aujourd’hui des femmes, et pourquoi ne seraient-elles pas initiées à des problèmes qui préoccupent tous les esprits ? »

Mme Borel haussa les épaules. Le front placide de M. Borel s’assombrit. Madeleine, émue, regardait Mlle Bathilde d’un air suppliant. M. et Mme Daubré avaient l’attitude embarrassée de gens qui vont assister à une scène de famille ; car tous connaissaient le caractère entier de Mlle Borel.

Mais la porte du salon s’ouvrit ; un domestique entra fort à propos et remit à M. Daubré une large enveloppe cachetée. C’était une dépêche télégraphique ainsi conçue :

« Agitation parmi les ouvriers. Tentative de coalition. Prompt retour. »

M. Daubré pâlit et tendit la dépêche à sa femme.

« Voilà, s’écria-t-elle, le résultat des discours de nos utopistes. »

Il était tard. Comme M. Daubré devait partir de bonne heure le lendemain, il désira se retirer.

Le jeune Daubré serra affectueusement la main de Mlle Borel, et lui exprima avec chaleur ses sympathies. Il salua respectueusement Madeleine.

« À propos, dit Mme Daubré en partant, j’ai besoin d’une institutrice pour Jeanne. Je voudrais trouver une jeune fille douce et bien élevée. Jeanne est déjà un peu grandelette, et il faut commencer son éducation.

— Nous nous informerons, répondirent Mlles Borel ; et si, parmi nos connaissances, nous découvrons un phénix, nous vous l’adresserons. »