Page:Gagneur - Le Calvaire des femmes 1.djvu/58

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M. Borel qui pâlit un peu, il ne s’agit pas de cela. Euphémie est allée trop loin. Tu sais que, malgré nos dissentiments, nous avons pour toi un attachement profond. Tout le monde ici est heureux de ta présence, et nous serions désolés si tu nous quittais pour quelques discussions sans importance. »

Il se tut ; mais ni les deux jeunes filles, ni Mme Borel, ni Maxime lui-même, qui pensait en ce moment à Mme Daubré, ou à Pouliche ou à Mademoiselle-Lucie, ou peut-être à toutes les trois à la fois, n’appuyèrent les paroles conciliatrices de M. Borel.

« Mon cher Théodore, répondit Bathilde, je te remercie de ces bons sentiments ; mais je t’assure que je parle sans colère. Je suis fort indulgente, tu le sais, pour les opinions d’autrui ; je comprends donc que vous combattiez les miennes. Seulement à quoi bon ces luttes qui fatiguent sans profit pour personne ? Quand on ne peut s’entendre, ne vaut-il pas mieux se séparer ? »

Elle se leva et sortit. Mais elle avait prononcé ces derniers mots avec un léger tremblement dans la voix.

« Vous faites des sottises, Euphémie, dit M. Borel fort ému. Puisque Bathilde ne surveille pas Madeleine, ne pouviez-vous la surveiller vous-même sans faire tant de tapage ? Vous savez que j’aime beaucoup ma sœur, malgré ses extravagances. Enfin, s’il faut vous le dire, la plus grande partie de sa fortune est engagée dans mon industrie. En ce moment-ci, une rupture entre nous pourrait me gêner beaucoup. »

Toute la famille demeura interdite.