Page:Gagneur - Le Calvaire des femmes 1.djvu/65

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rence dans laquelle s’étalaient d’anciennes peintures, de vieux bijoux et des dentelles surannées.

Elle se hasarda sur le seuil de la porte, où pendaient des robes fanées à falbalas, et elle pénétra dans une boutique sombre, encombrée des mille et un trésors, des mille et une misères du bric-à-brac, tristes épaves d’un luxe éphémère, d’existences brisées. Que de drames dans ces monceaux de chiffons malpropres ! Cette paire de bottines, cette robe modeste étaient peut-être la dernière richesse d’une pauvre fille qui mourait de faim. Et ces dentelles, et ces bijoux, quels bouleversements de fortune les ont amenés là !… Et jusqu’à ce bois de lit, jusqu’à ce poêle rouillé qui racontent d’horribles misères !

En entrant là, Madeleine se sentit oppressée, comme si elle s’était fourvoyée dans un mauvais lieu.

Au comptoir se tenait un petit vieillard occupé à examiner avec une loupe quelque bijou microscopique. Il s’harmoniait si parfaitement avec tout ce qui l’entourait, il s’était si bien approprié les teintes, les formes concassées et tremblotantes des objets antiques dont il était environné, qu’on l’eût pris volontiers pour une curiosité automatique ou pour quelque vieux portrait de l’école flamande.

Quand Madeleine lui présenta son tableau tout frais verni, aux couleurs vives et lumineuses, la vue du petit homme parut singulièrement offensée de cet éclat. Aussi s’empressa-t il de le rendre à Madeleine.

Alors elle lui proposa ses bijoux de jeune fille.

« Ah ! ceci c’est autre chose, » dit-il.

Il prit les bijoux. Mais il regarda aussi celle qui les lui offrait. Après un examen attentif qui inquiétait Ma-