Page:Gagneur - Le Calvaire des femmes 1.djvu/64

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eût dû prononcer un arrêt de vie ou de mort. Mais le marchand demeurait impassible.

« De qui est cette peinture ? dit-il enfin.

— Elle est de moi, » répondit Madeleine en rougissant beaucoup.

Le marchand lui rendit sa toile.

« J’en suis fâché mademoiselle ; mais nous n’achetons pas ces sortes de tableaux. Cela manque de manière, ce n’est d’aucune école. »

À ces paroles, qui détruisaient toutes ses espérances, Madeleine éprouva comme une défaillance.

Elle se disposait à sortir.

« Je vous en donne dix francs, fit le marchand, qui la rappela.

— Non, répondit-elle.

— Eh bien, vingt, et je vous assure que personne ne vous les offrira. »

Madeleine s’éloigna, navrée.

« C’est donc bien mauvais, pensait-elle, qu’on m’en offre si peu ! Et c’est là-dessus que je comptais pour soutenir ma famille, pour me créer une position, pour… »

Elle allait au hasard, perdue dans ses tristes pensées, accablée par le découragement.

Elle descendit la rue de Choiseul, puis la rue Neuve-des-Petits-Champs, et se trouva dans la rue Saint-Roch. Elle se souvenait y avoir vu un grand nombre de marchands de bric-à-brac. Peut-être trouverait-elle à vendre là ses bijoux et son tableau.

Elle entra dans plusieurs boutiques, où du tableau et des bijoux on ne lui offrit pas au delà de quarante francs. Elle était désespérée.

Enfin elle aperçut une devanture de chétive appa-