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FEUILLETON DE LA PRESSE


du mardi 30 juillet 1861


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TROIS SŒURS RIVALES [1]


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V (Suite)

— Mon père, dit Henriette en se relevant avec fermeté, je vais parler quoi qu’il m’en coûte, et, s’il le faut, je saurai résister à votre colère ; car il s’agit de mon bonheur et de celui d’un autre.

À ces paroles, qui attaquaient ouvertement son autorité, M. de Charassin fut prêt à se fâcher ; mais, faisant une prompte réflexion, il s’écria gaîment :

— Ah ! j’y suis, j’y suis ! que n’ai-je donc deviné plus tôt ! Et prenant un air de finesse, je parierais, ajouta-t-il, qu’il s’agit de mariage.

— Quoi ! mon père, vous sauriez ?… dit Henriette avec une honte parfaitement jouée.

— Comment, si je sais ! repartit le baron ; mais me prends-tu pour un imbécile ou tout au moins pour un aveugle ? Si je sais ! Eh ! oui, mon enfant, j’ai tout deviné. Ce n’est pas à un vieux militaire comme moi qu’on apprend ce que c’est que l’amour. Ce

  1. La reproduction est interdite. — Voir la Presse des 24, 25 et 26 juillet.