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Elle ouvrit un cours de langue française pour les deux sexes, et avec la collaboration d’une entremetteuse allemande, elle eut bientôt un certain nombre de jeunes élèves.

Cette école, où l’on donnait des leçons jour et nuit, à l’heure ou à la séance, avait tout à fait l’air d’une succursale de ce buen retiro discret à l’usage des amants sans asile, des vagabonds de l’amour, qu’elle avait tenu rue de Penthièvre.

La soldatesque y venait cuver ses victoires, entre des pots de bière et des chevelures blondes.

Des Gretchen de quatorze et quinze ans, qui gagnaient là dedans à peine quelques kreutzer, légèrement costumées, étudiaient avec leur éminent professeur Pigeonnier, l’art si compliqué de faire… parler les muets, de faire s’agiter les paralytiques, de faire brûler les lampes sans huile.

Tous les raffinements d’une artiste de Paris, Marie les connaissait à fond, au besoin les perfectionnait, et surtout les enseignait avec une clarté et une précision