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DE LA MAIN.

cinq suffisent pour remplir ce but, et la nature ne fait rien de superflu, car elle a un soin égal de ne rien faire en moins et rien en plus[1] ; le manque rend l’opération impossible, et le superflu est un empêchement pour les parties qui suffisent à l’opération, en devenant un poids étranger qui par cela même est gênant. Enfin l’existence d’un sixième doigt contre nature confirme notre raisonnement[2].


Chapitre xx. — De l’utilité de l’inégalité des doigts. — Comparaison des doigts avec les rames des trirèmes.


Pourquoi les doigts sont-ils inégaux[3] ? Pourquoi celui du milieu est-il plus long que les autres ? C’est sans doute parce qu’il était plus convenable que leurs extrémités arrivassent toutes sur la même ligne, lorsqu’ils embrassent certains corps volumineux, et quand on veut retenir entre les doigts quelques objets liquides ou petits, car soit qu’on veuille tenir fortement quelque objet volumineux ou le lancer violemment, la préhension égale de tous les côtés est très-efficace. Dans ces sortes d’opérations, les cinq doigts paraissent former la circonférence d’un cercle, surtout quand ils embrassent un corps exactement rond. En effet, pour ces corps vous aurez une connaissance très-exacte de ce fait qui a lieu pour les autres, mais avec moins d’évidence, à savoir que les extrémités des doigts arrivant à être opposées de tous côtés sur la même ligne, rendent la préhension plus ferme et la projection plus vigoureuse. Il en est de même, je pense, sur les trirèmes où les extrémités des rames arrivent sur la même ligne, bien qu’en réalité les rames elles--

  1. Galien exprime la même pensée à la fin du chapitre vi, du premier livre Des facultés naturelles (t. II, p. 15), et il ajoute que le traité De l’utilité des parties est la démonstration de cette sagesse de la nature.
  2. Dans le traité De Differ. morb. cap., viii, t. VI, p. 862, Galien considère aussi comme une monstruosité gênante la présence d’un sixième doigt.
  3. Aristote ajoute à ce que j’ai rapporté plus haut (note de la page 120) : « C’est avec raison que le dernier doigt est petit, et que le doigt du milieu est grand, de la même manière que la rame du milieu dans un vaisseau (c’est aussi la comparaison employée indirectement par Galien) ; car le corps qui doit être embrassé en cercle doit l’être surtout par la partie moyenne, pour que l’office de la main soit mieux rempli. » Cf. Hoffmann, Variæ lect. II, xxiv.