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UTILITÉ DES PARTIES DU CORPS HUMAIN, VI, ii.

fumée, la poussière, un air malsain, empoisonné, corrompu par des miasmes qui s’exhalent de corps putréfiés, ou par d’autres causes, attaquerait bientôt la vie dans son principe et détruirait complétement l’animal. Mais c’est du poumon et non pas du pharynx, ni du dehors immédiatement que le cœur attire l’air, bientôt renvoyé à ce même poumon ; et cette disposition nous permet, tantôt d’user longtemps de la voix, tantôt de nous abstenir complétement de respirer, sans nuire en rien à la fonction du cœur. Si, par le pharynx, le cœur eût aspiré sans intermédiaire l’air du dehors, et l’eût également expiré au dehors, il en résultait nécessairement l’un ou l’autre de ces deux dangers, ou de respirer malencontreusement un air pernicieux, ou d’être suffoqué sur-le-champ, faute de respirer. C’est pourquoi la nature n’a pas chargé le cœur seul de la fonction respiratoire, elle l’a enveloppé du poumon et du thorax, qui sont chargés de lui fournir l’air en même temps qu’ils doivent produire la voix. De plus, le cœur est environné d’une part par le poumon, qui sera pour lui comme un coussin élastique mollet, selon l’expression de Platon[1], de l’autre par le thorax, qui forme une robuste ceinture protectrice, non-seulement du cœur, mais aussi du poumon.

La nature a établi le cœur au centre même de la cavité thoracique, place très-favorable à sa sécurité, et qui lui procure, de la

  1. Voici le passage de Platon (Timée, p. 70 c.), auquel Galien fait allusion : « En vue des palpitations violentes du cœur (πηδήσει τῆς καρδίας) qui se manifestent dans l’attente du danger et dans la surexcitation de l’âme énergique, les Dieux (sachant d’avance que tout ce gonflement causé par les passions devait se produire par le feu), pour porter secours au cœur, imaginèrent la forme du poumon, d’une part, molle et exsangue, de l’autre, percée à l’intérieur d’une multitude de trous comme une éponge ; ils y implantèrent le cœur afin que, le poumon en le refroidissant par l’admission de l’air et de la boisson (voy. mon édit. des Frag. du comment, de Galien sur le Timée, note 53, p. 48, et la Dissert. sur la physiol. de Galien), permette l’aspiration de l’air (ἀναπνοήν) et procure du soulagement dans la chaleur brûlante. C’est pourquoi ils distribuèrent dans le poumon les conduits de l’artère (la trachée artère) et ils étendirent le poumon autour du cœur comme un coussin mollet (ἄγμα μαλακόν, vulg : ἅλμα μ. Galien ; μάλαγμα, Hermann, dans son édit de Platon ; Collect. Teubner, t. IV, p. 25), afin que le cœur, lorsque l’âme énergique est fortement agitée en lui, frappant contre un corps qui cède et qui rafraîchit, en éprouve moins de souffrance, et puisse mieux obéir à la raison unie à l’âme énergique. »