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UTILITÉ DES PARTIES DU CORPS HUMAIN, VIII, iv.

départ la recherche du but de l’existence de la tête. Or les crabes, toute la famille des crustacés, les phalènes encore et beaucoup d’autres insectes semblables, ou manquent absolument de tête ou n’en ont qu’un rudiment ; néanmoins tous ces animaux ont les sens tous placés sur la poitrine, et nécessairement le principe de ces sens établi au même endroit.

Ce principe, il ne faut pas l’appeler l’analogue de l’encéphale[1] comme Aristote le faisait dans des cas semblables, trompé par les dénominations, et dirigé non par la substance même de la chose mais par les circonstances fortuites. C’est ce qui a lieu pour le terme encéphale. En effet, ce nom lui vient de sa position. Platon (Timée, p. 73) voulant caractériser sa substance et pensant être dans le vrai, l’appelle moelle. Mais même si c’est de la moelle, il faut encore ajouter quelque chose à cette appellation. En effet, il existe une moelle dans le rachis, une autre dans chacun des os, et ces espèces de moelles ne sont pas les principes de toute sensation et de tout mouvement. Aussi beaucoup la nomment-ils moelle encéphalique, comme on dit moelle épinière, d’autres, sans l’appeler moelle encéphalique, l’appellent tout simplement la moelle de l’encéphale. Mais, d’après ceux-ci, c’est le sens du raisonnement et non

  1. Ἣν οὐκ ἀνάλογον τῷ ἐγκεφάλῳ χρὴ καλεῖν vulg. ; le manuscrit 2154 et le texte que Hoffmann avait sons les yeux portent ἢν οὐκ, κ. τ. λ.. Hoffmann (l. l., p. 165, et Append. var. lect.) propose ἤ που ἀνάλ., et dans les Variæ lectiones il interprète : « An hoc opportet analogum cerebro dicere ? Ita per interrogationem interpretari oportet. Hoc enim vult Galenus : Cum ibi sit principium sensus et motus in his, cur principium illud appelletur non cerebrum, sed analogum cerebro. » C’est bien, en effet, le sens qui résulte de toute la discussion à laquelle Galien se livre dans ce chapitre, mais il n’est pas nécessaire, pour trouver ce sens, de changer le texte vulgaire, comme le veut Hoffmann, bien que la construction soit un peu embarrassée dans tout le passage qui nous occupe. — En résumé, pour Galien le centre nerveux, qu’il soit situé dans la tête ou dans la poitrine, est une même substance ; il doit donc porter le même nom ; mais, suivant lui, le nom grec est mal choisi, puisqu’il dérive d’une circonstance accessoire, la position, et qu’il est irrégulier pour le langage de dire que l’encéphale est dans la poitrine. Aussi faut-il préférer, soit le nom latin cerebrum, soit un autre, comme scindapsus, mot qui, en grec, ne signifiait par lui-même pas plus que chose en français, mais qui pouvait prendre un sens de convention. Toutefois si on conserve le mot encéphale, ne dites pas du centre nerveux, quand il est dans la poitrine, que c’est l’analogue de l’encéphale, car dans la poitrine ou dans la tête, c’est une même substance.