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DES MŒURS DE L'ÂME.

les plaies et dessécher l’humidité des yeux, comme s’il n’y avait aucune différence à dire : l’aloès peut purger, ou il a une puissance purgative. Pouvoir dessécher les yeux, signifie aussi la même chose qu’avoir une puissance siccative. De la même manière, quand nous disons : l’âme logique, qui siège dans le cerveau, peut sentir au moyen des sens, peut se souvenir sans un excitateur direct, par l’intermédiaire des choses sensibles [qui l’ont frappée autrefois] ; elle peut voir dans les faits la conséquence ou l’antagonisme, l’analyse ou la synthèse ; nous ne démontrons pas autre chose que si nous disions plus brièvement : l’âme logique a plusieurs puissances[1] : la sensation, la mémoire, la compréhension, et ainsi de chacune des autres puissances. Si nous disons non-seulement d’une manière générale que cette âme a la puissance de sentir, mais encore en particulier qu’elle peut voir, entendre, percevoir les odeurs, goûter les saveurs et toucher ; cela revient de nouveau à dire qu’elle est douée des puissances optique, de l’odorat, acoustique, du goût, et tactile. Platon déclare aussi qu’elle jouit de la puissance de désirer, le mot désir (ou concupiscence) étant pris ici dans son sens ordinaire, et non dans l’acception spéciale que lui donne habituellement cet auteur[2]. D’après Platon, il y a pour cette âme plusieurs espèces de désirs, et il y en a plusieurs aussi pour l’âme irascible ; mais il y en a beaucoup plus encore, et de plus variés, pour la troisième âme, qu’à cause de cela il appelle, par excellence, l’âme concupiscible, attendu qu’on a coutume d’appeler du nom du genre ce qui excelle dans le genre lui-même. Par exemple, si on dit : ce vers a été fait par le poëte, ce vers a été fait par la poétesse, nous comprenons tous que le poëte désigne Homère, et la poétesse Sappho ; de même, on appelle par excellence bête féroce le lion ; il y a beaucoup d’autres choses auxquelles on donne par excellence le nom du genre. Donc, la partie de l’âme, que nous appelons habituelle-

  1. Le texte vulg. porte δυνάμεις ἔχει τὰς πλείους ; mais il est évident qu’il faut, avec le ms. de Flor., supprimer l’article.
  2. On voit par la phrase suivante, et l’on sait du reste par toute la doctrine de Platon, que le désir ou concupiscence, ou si l’on veut encore l’appétit, était, pour ainsi dire, la caractéristique de la troisième espèce d’âme, laquelle habitait dans le foie. — Voy. H. Martin, Notes du Timée, t. II, p. 295-301. Voy. aussi sur la définition générale du mot désir, Cratyl., p. 419, d-e.