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DES FACULTÉS RÉTENTIVE ET EXPULSIVE.

grêle ? Qu’y voit-on en effet, de plus puissant pour l’altération que ce qu’on voit dans l’estomac ? Est-ce le nombre des tuniques, le voisinage des autres viscères qui l’entourent, ou la durée du séjour, ou une chaleur naturelle des organes ? Les intestins ne sont supérieurs à l’estomac par aucune de ces circonstances. Pourquoi veut-on donc que le pain, qui souvent a séjourné une nuit entière dans l’estomac, se conserve en gardant ses propriétés primitives, et qu’une fois descendu dans les intestins il devienne aussitôt excrément ? En effet, si un temps aussi long ne peut l’altérer, un temps court ne l’altérera pas non plus. Si ce temps suffit, comment un long temps ne suffirait-il pas bien plus encore ? L’aliment subit-il une altération dans l’estomac, mais une altération autre que celle qui résulte de la nature de l’organe altérateur ? Ou bien subit-il cette altération même, et non pas une altération qui est propre au corps de l’animal ? Cela est encore bien plus impossible. Et cependant la coction n’était que l’altération en la qualité propre à l’être nourri (cf. Util. des parties, l. l.). Si donc la coction consiste en cela, et si nous avons démontré que l’aliment reçoit dans l’estomac la qualité convenable à l’animal qui doit être nourri par lui, il est suffisamment prouvé que la coction de l’aliment s’opère dans l’estomac.

Asclépiade est ridicule en prétendant que ni les éructations, ni les vomissements, ni la dissection ne manifestent la qualité des aliments cuits dans l’estomac, quand il suffit de l’odeur exhalée par ce viscère pour indiquer que la coction est opérée. Il pousse l’absurdité à un point tel que, si les anciens ont dit que les aliments se transforment en chyle utile dans l’estomac, il veut qu’on juge de l’utilité de ce chyle, non par la puissance, mais par le goût, comme si dans l’estomac la pomme devenait plus pomme, ou le miel plus miel qu’auparavant ; car c’est ainsi qu’il faut raisonner avec lui.

Érasistrate est bien plus absurde et plus ridicule encore, soit qu’il ne songe pas que la coction est analogue à la cuisson dans un liquide, comme les anciens ont dit, soit qu’il se trompe lui-même volontairement. Il prétend donc qu’il n’est pas juste d’assimiler la coction produite par une chaleur modérée à la cuisson dans un liquide, comme s’il fallait placer sous l’estomac les feux de l’Etna, ou comme si sans cela ce viscère ne pouvait altérer les