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la moindre culture religieuse, mais pas le moindre doute ; la pensée était ailleurs. Le clergé, indulgent, se contentait de peu, donnait de bons conseils jamais suivis et s’en remettait à la miséricorde divine.

J’ai dit plus haut que ces pauvres gens traversaient un moment l’école ; mais ce qu’était cette école, on vient de le voir. Son effet, nul.

L’action catholique tentait la transformation. Il s’agissait d’obtenir l’ouvrier pénétré de piété, ayant assez de lecture pour son instruction religieuse, capable même de lire le latin des offices, acceptant le dur et malpropre travail avec résignation, louant Dieu, restant tempérant, remplaçant par quelques cantiques les refrains bachiques et licencieux, trouvant son repos dans l’accomplissement des pratiques pieuses et se préparant à la vie éternelle par des méditations sur la bonne mort.

Pour cela, il fallait agir, dès les premières années, par l’école, par l’école religieuse.

L’école, comme on la connaissait, c’était l’école ouverte par quelque bonhomme ou quelque femme qui, sachant à peu près lire, se mêlait de l’apprendre à autrui. On y envoyait les garçons et les filles aussi. On était entre voisins, sans manière : le matin, le maître gardait son bonnet de nuit et, dans le jour, quand il faisait chaud mettait bas sa veste. On s’expliquait en patois et on n’en finissait jamais d’apprendre à lire : l’élève interrompant sa fréquentation à propos de n’importe quoi. En la courte inspection d’avril 1684, cinq écoles privées sont visitées, cinq — malgré les prescriptions de l’Archevêché — ont des garçons et des filles. Dans l’une d’elles, importante, de 74 élèves, « les filles, de 15 à 18 ans, sont avec les garçons du même âge, fort dissipées ». Dans d’autres écoles, la toilette de ces jeunesses est un peu abandonnée : elles sont « découvertes » dit pudiquement l’inspecteur. De telles écoles ne scandalisaient personne en ce milieu qui ne demandait qu’à se laisser joyeusement vivre. Ces maîtres et ces maîtresses n’ont pas le goût du piétisme. Aussi voit-on les inspecteurs scandalisés : pas trace « d’école chrétienne » disent-ils.

Ce qu’on entend faire c’est une école religieuse ordonnée sur une règle sagement réfléchie et imposée à tous. Et d’abord, on sépare les filles et les garçons : les uns confiés aux maîtres, les autres aux maîtresses. Puis, dans une suite de prescriptions, on prévoit tout. Voici la « Petite École des pauvres ».

L’école aura une liste de ses élèves, un « catalogue » semblable, sans aucun foute, à ceux que les confréries appendent aux murs des églises. Elle a une « chaire » pour le maître, des « bancs » pour les élèves. Des tables per-