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mettant d’écrire, je n’en vois trace : à Notre-Dame on demande « d’abaisser les bancs » sans souci de la relation à une table qui pourrait être devant[1]. Elle a un bénitier à la porte et on entre en faisant le signe de la croix ; elle a des images pieuses ; elle a, surtout, un autel orné, un oratoire, une « chapelle ». Des chapelets font partie du matériel scolaire.

Pour la discipline, les élèves sont groupés par dizaine et chacune de ces « décuries » a un petit chef, un « décurion » ; chez les filles ce sont des « décurionnes » : vilaines appellations. Les commandements sont précédés d’avertissements à la clochette. Les moyens de coercition sont les coups. Chez l’abbé Carrier, à la Grand, on châtie les enfants « indiscrètement, les frappant avec un baston à tout moment, sans leur faire connoître leur faute » ; l’abbé Pomerol « les frappe indiscrettement » ; chez l’abbé Deville « le maître les frappe trop rudement » ; c’est la mode : « on chastie les enfans avec fureur et sans modération ».

On commence la classe par une longue prière que tous les élèves devaient savoir par cœur. Puis on attaque la fameuse « demande » du catéchisme. La demande et la réponse lues, et sans doute expliquées, par le maître, sont relues et répétées et relues, par quelques-uns des élèves les plus forts munis du manuel, jusqu’au moment où on les suppose apprises et où chaque élève récite à son tour. Pour un texte de huit à dix lignes seulement, on devine le travail : les coupures, de tel à tel mot, puis la juxtaposition ; on entend surtout la confusion des voix, et, sans peine, on soupçonne les distractions et les coups de bâton qui ramènent à la réalité et au texte. Prenait-on la lecture ? Si peu. Les deux heures et demie du matin étaient bientôt passées : voilà déjà la prière de sortie. Ce n’est que le soir — à la suite d’une troisième prière — qu’il devait être possible d’aborder sérieusement la lecture « par bandes » devant des tableaux muraux, des « cartes » ; quelque instruction religieuse, peut-être encore du catéchisme : après quoi, la longue prière du soir et les trois ou quatre De profundis obligés. Je ne parle pas des exercices pieux en dehors de l’école : la messe du matin et l’adoration du soir : je n’en vois pas la place en un emploi du temps si réduit : la messe était-elle dite avant, pendant ou après la classe (de 7 et demie à 10) ?

  1. En juillet 1793, la troupe envoyée à Saint-Étienne par les révoltés de Lyon mit à sac l’école de garçons de la Grand sous le prétexte que la Société populaire y tenait ses séances. J’ai sous les yeux l’état des destructions estimées par deux menuisiers : j’y vois la « chapelle », la chaise et le bureau du maître, la clochette, le « catalogue » des élèves, une armoire, « la cuisine du poille », un « réverbert » certainement destiné aux réunions politiques tenues le soir.

    Je n’y vois point de tables, mais des « gradins » sur un « plancher » (24 pieds X 14) que supportaient cinq « terrassiers ».