Page:Gallon - Taterley, trad Berton, paru dans Je sais tout, 1919.djvu/57

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
TATERLEY
749

fait avait de l’importance à ses yeux : une douce enfant avait embrassé son visage ridé et l’avait appelé : « Cher Taterley ! »

Le reste disparaissait à ses yeux, il était joyeux de l’oublier.

Une autre pensée lui était venue aussi impérieuse : il fallait qu’il rendît l’argent qu’il avait volé et il avait le sentiment confus que se refuser à cette restitution le séparait de ceux qu’il aimait tant.

Et c’est pourquoi, se glissant un soir dans l’obscurité, profitant de l’obscurité de la rue pour n’être point vu, il laissa tomber une enveloppe dans la boîte aux lettres de la maison de Bloomsbury.

Une autre crainte vint encore l’assiéger : le désir d’une vengeance viendrait-il au cousin Hector, chercherait-il à mettre la main sur lui ?

Il errait dans les rues, redoutant des mains prêtes à le saisir, tremblant sous les regards qui se posaient sur lui par hasard.

Il revint à la grille de l’atelier. Le portier la refermait et Caleb, son chapeau bien enfoncé sur les yeux, demanda à l’homme si M. Brett était chez lui.

Le portier le dévisagea.

— Ils sont partis ce matin, dans un fiacre à quatre places, avec des bagages. Je crois qu’ils sont allés faire un petit tour, ça en a l’air.

Caleb se détourna, une pensée dominante lui torturait l’esprit. Il n’y avait qu’un endroit au monde vers lequel il tournait ses yeux. Il sentait que c’était là qu’ils étaient allé. Il pouvait s’y cacher, eux le cacheraient, au besoin.

Désormais, ses idées n’allèrent pas plus loin. Il se mit en route tout chancelant, lentement mais résolument, dans cette direction, avec des yeux pleins d’espoir.

On apporta l’enveloppe de Caleb au cousin Hector, qui était vautré au milieu de tout le confortable d’un luxueux hôtel et se dorlottait pour se remettre de son choc nerveux.

Il l’ouvrit d’un air anxieux, lut les mots écrits au crayon et compta les billets de banque.

— Quel satané vieux gredin, dit-il en riant. J’étais convaincu que les billets étaient brûlés et j’allais aller voir à la banque si on ne les rembourserait