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JE SAIS TOUT

Oh ! mais ça n’est pas pour demain, Taterley.

— C’est pour bientôt, c’est pour maintenant dit Caleb. Chut ! ne lui dites pas à elle, ne le dites pas à la chère enfant.

Cela devait arriver très tôt… La fraîche soirée vint vite et tous les bruits du jour s’éteignirent en doux murmures. La lourde senteur des fleurs flottait à travers la fenêtre ouverte et remplissait la pièce.

Soudain, comme Ella était assise auprès de lui, il attira ses mains sur sa poitrine et, penchant la tête, mit ses lèvres sur son visage. D’une voix à peine perceptible, des paroles lui vinrent aux lèvres lentement et par saccades, comme s’il répétait avec difficulté quelque chose qu’il avait oublié auparavant :

— Ni les richesses, ni le pouvoir, ni la crainte des hommes…

Il s’arrêta, la regarda au fond des yeux avec une lumière dans le regard :

— Il y a quelque chose de meilleur, de plus doux, de plus gai que tout cela. Quelque chose que nous apprenons dans l’amertume, dans le chagrin…

Ses lèvres s’agitèrent, les sons s’éteignirent, sa tête retomba lourdement.

Les cheveux brillants d’Ella ombrageaient sa face mourante, leur douceur touchait son visage à jamais terreux.

— Taterley ! dit Ella haletante.

Les sanglots lui montaient à la gorge et elle répéta : Taterley !

Mais le faux Taterley était allé rejoindre le vrai.


TOM GALLON

TRADUCTION DE Mme  PIERRE BERTON