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LXXIV


La Forêt monstrueuse dort, balancée par le vent. Les colonnes des arbres, noyées dans la brume du sol, sont comme les mâts pressés dans un port.

Semblable à un torrent au fond d’un précipice, le Maroni s’écoule entre les murailles des lianes.

La nuit humide descend…

Le bruissement de la vie obscure des arbres emplit le silence. Une vie intense est là, endormie : la vie puissante des choses que le soir engourdit.

Les hommes, accablés par la fièvre, dorment et gémissent. La nuit épaisse et lourde efface les dernières ombres.

Seul, près du feu qui chasse les moustiques, j’attends en vain le sommeil.

Et voilà que du fond du couloir de la rivière, des profondeurs de la nuit, voici que vient la voix de la Forêt, comme autrefois venait de l’horizon la voix solennelle de la Mer.

Des phrases de vent s’éparpillent dans les