Page:Garcin de Tassy - La Langue et la littérature hindoustanies en 1876.djvu/24

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

table auteur de l’ouvrage dont il s’agissait ? Ses vers avaient-ils une notoriété telle qu’on pût décider s’ils étaient réellement de lui ou de Gaubar ? Bien des poëtes peu connus ont pillé des diwans entiers à d’excellents poëtes, et se sont ainsi rendus célèbres eux-mêmes sans qu’on pût s’assurer s’ils étaient réellement les auteurs des vers qu’ils s’attribuaient. Ce qu’il y a de plus fâcheux, c’est que les cacidas de louange valent quelquefois à l’auteur une gratification de la part du prince qui en est l’objet, et on conçoit, dès lors, que le plagiat est d’autant plus coupable, puisqu’on prive ainsi l’auteur véritable de recevoir la récompense qu’un autre touche injustement… »

La fête du ta’ziya[1] est toujours célébrée dans l’Inde avec la plus grande solennité, et c’est à cette occasion qu’on entend chanter dans les rues et surtout dans l’endroit spécial appelé Karbala, du nom du lieu ou se passa la scène objet de cette fête funèbre, les nouveaux marsiyas[2] dus aux poëtes contemporains.

Voici ce que je trouve dans un journal indigène[3] sur une des processions qui ont eu lieu dernièrement à Lakhnau à cette occasion : « Le chilhum[4] est parvenu à sa fin. Le 20 de safar, après le coucher du soleil, le ta’ziya du nabab Mumtaz uddaula arriva au Karbala en grande pompe et solennité. Outre la réunion d’usage, il y avait une affluence extraordinaire de spectateurs. La clarté que don-

  1. « Deuil ». On donne aussi ce nom, ainsi qu’on le verra plus loin à la représentation du tombeau de Huçaïn. Voy. « l’Islamisme », p. 327 et suiv.
  2. Sur ces complaintes, voy. aussi « l’Islamisme », p. 325 et suiv.
  3. Awadh Akhbâr du 19 mars 1876.
  4. Ce mot signifie « quarantième ». Il s’emploie pour designer à la fois la quarantaine et le quarantième jour de deuil consacré à la mémoire du martyre de Huçaïn, et accessoirement de celui de Haçan. Ce deuil commence le 1er de muharram et finit proprement avec solennité le 10 de ce mois ; mais on célèbre encore le quarantième jour qui le termine en réalité, et qui tombe ainsi le 20 de safar, surnommé almuzaffar « le victorieux ».