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Page:Garcin de Tassy - Les Auteurs hindoustanis et leurs ouvrages.djvu/8

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Dès le commencement du VIIe siècle, les musulmans parurent en conquérants dans l’Inde ; Mahmud le Gaznévide, surtout, y obtint, vers l’an 1000 de notre ère, des succès éclatants ; et, dès lors, le bhakha indien fut modifié dans les villes. Quatre cents ans plus tard, Tamerlan, de race mogole[1], entra dans l’Hindoustan, s’empara de Delhi, et jeta les fondements du puissant empire établi en définitive par Baber, en 1505. Alors la langue indienne (hindi) se satura entièrement de persan, déjà chargé lui-même du nombre illimité des mots arabes que la conquête et la religion y avaient introduits, et l’indien moderne devint, par ce curieux mélange, le confluent du courant japhétique et du courant sémitique, sorte de synthèse philologique tout à fait anormale[2]. Il se forma même un double idiome indomusulman, une langue d’oil et une langue d’oc : l’indien du nord, auquel on donna le nom d’urdu[3] parce que ce fut dans l’urdu (camp) impérial qu’il prit naissance, et celui du midi ou Décan, qu’on nomma conséquemment dakhnî. Mais le hindi ne se perdit pas ; il continua à être, usité en caractères dévanagaris, sans mélange de mots persans et arabes, parmi les Hindous qui étaient peu en rapport avec les musulmans, surtout à la campagne. Il y eut ainsi deux

    tandis que cette appellation a été réservée au vieux français, qui se forma au moyen-âge par la simplification du latin enrichi des débris de ranclenne langue des Gaules.

  1. C’est à cause de cette circonstance que les Indiens ont appelé Empire Mogol le grand empire musulman de Delhi, et que nous en nommions le souverain le Grand Mogol. Au surplus, on donne dans l’Inde le nom de Mogols à tous les musulmans venus du Nord, qu’ils soient Persans ou Tartares d’origine.
  2. Ce que je dis ici se rapporte à l’arabe, car les mots proprement persans rentrent dans la famille indienne.
  3. Pour zaban-i urdu, « langue de camp », ainsi qu’on le verra plus loin.