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Les Hindous nient que l’hindoui dérive du sanscrit. W. Jones[1] et d’autres savants[2] ont soutenu cette opinion[3]. Toutefois, quoiqu’on puisse compter environ un dixième des mots usités en hindoui, surtout parmi ceux de l’usage le plus commun, qu’on ne saurait rattacher au sanscrit, je pense que ce serait un paradoxe que de soutenir que l’hindoui ne dérive pas de cette langue admirable. Il en dérive, ainsi que je l’ai dit plus haut, comme le roman du latin ; mais la langue, à la vérité, qui est formée surtout plus immédiatement du sanscrit, celle qui paraît en être le véritable patois, c’est le bengali. Elle est au sanscrit ce que l’italien est au latin. Il est évident qu’il y a en hindoui une certaine quantité de mots étrangers au sanscrit qui ont pu être employés vulgairement dès les temps anciens, sans avoir été admis par les écrivains, et qui, par conséquent, ne sont pas reconnus comme sanscrits. La même chose est arrivée à l’italien et au français. On trouve même, chose remarquable, un certain nombre de ces mots qui ont passé dans les langues indo-germaniques. Ainsi le verbe लादनौं en allemand laden, en anglais to load, « charger ; » les substantifs ओर, ὅρος (horos), latin ora, « côté, limite ; » पीस्सू « puce ; » बर्दाई ou बर्दैत « barde ; » ताओ, en espagnol tio, « oncle ; » कायर « couard ; » मूछ « moustaches ; » गन्ना « canne (à sucre) ; » l’adjectif मूनू « menu ; » les prépositions दा, दे, दी en français de, en italien da, di, etc. etc.

Quant aux mots sanscrits, ils ont souvent été conservés tels quels ; plus souvent altérés et de plusieurs manières, le même mot étant employé dans diverses formes ; enfin, quelquefois défigurés au point d’être méconnaissables. Les variantes du même mot sont employées selon les auteurs ou selon les siècles. Ainsi, par exemple, on trouve à la fois गृध्र « vautour, » comme en

  1. Troisième discours anniversaire de la Société asiatique de Calcutta.
  2. Hodgson, Journ. de la Soc, asiat. de Calcutta, 1827, numéro d’août.
  3. Golebrooke lui-même paraît l’adopter, « This opinion, dit-il (Asiat res. t. VIII, pag. 223), I do not mean to controvert. »