Page:Garin Le Loherain.djvu/23

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élevées, les pennonceaux flottaient dans les airs ; il ne restait plus qu’à faire quelques pas et commencer la mêlée.

Amauri , le seigneur de Nevers, fait avancer le premier sa bataille : il lâche les rênes de son cheval, frappe un païen, perce l’écu, fausse le haubert, et de son roide épieu pénètre dans le corps de son adversaire. « Nevers » crie-t-il en l’abattant de cheval, « frappez, imitez-moi ! ces gens-là sont les ennemis de Dieu, et ne sont venus que pour prendre tout ce que nous avons. » La mêlée devenue générale dura l’espace de trois grandes journées. Les Païens plus nombreux gardèrent longtemps l’avantage : combien de chevaliers tombèrent devant eux pour ne plus se relever ! Bruiant surtout, Dieu puisse l’étrangler !, conduisait une bataille armée de grands arcs turcois qui faisaient dans nos rangs de cruels ravages : le fracas des rencontres était entendu de deux grandes lieues ; malheur à qui vidait les arçons, il était bientôt écrasé par le passage continu des chevaux. On remarquait les belles armes et le grand cheval d’Aleaume, seigneur de Ponthieu, qui conduisait trois cents chevaliers de sa terre, et plus d’une fois arrêta et fit reculer les Sarrasins. Un peu plus loin, à sa droite, Charles Martel frappait, éventrait devant lui. Les Païens n’osant attendre son branc d’acier se réfugient sous l'étendart. Marsoufle vint à leur aide, avec les mécréants de son pays ; les tambours éliraient nos chevaux, les arcs turcois percent nos hommes. Il fallut reculer, et Charles Martel est alors frappé de deux épieux fourbis, dont l’un ouvre son épaule, l’autre pénètre dans sa poitrine. Le cheval tombe mort sous lui, et les sergents de sa bataille ont grand peine à le défendre et à rester maîtres de son corps. Cependant Hervis arrivait de Soissons à Troyes. Il entend le bruit de la mêlée et les cris des mourants ; il voit entrer les navrés