Page:Garin Le Loherain.djvu/30

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m’a fait roi, en dépit de ceux qui ne m’aimaient guères ? — Vous lui devez en effet beaucoup ; mais rien ne presse, » répond Hardré, « Hervis est riche d’argent et d’amis, il peut fort bien se défendre lui-même. D’ailleurs le royaume est en mauvais point ; les longs ravages causés par Girart de Roussillon ne sont pas réparés. Demandez un répit au Loherain : l’hiver passera ; revienne avril, et vous lui amènerez secours, s’il en a encore besoin. »

Retournés vers Hervis, ils lui rendent les mêmes paroles, et peu s’en faut que le Duc n’enrage en les écoutant : « Par le nom de Dieu ! Sire, » s’écria-t-il assez haut pour être ouï de tous, François, Angevins et Manceaux , « le conseil ne vient pas de vos amis. On oublie ce que je fis dans la bataille où fut navré le roi votre père ; comment je l’escortai à Saint-Denis ; comment, en dépit des barons du pays, j’ai posé sur vôtre tête la grande couronne. C’est moi qui vous donnai pour maire cet Hardré, que je vois là et qui vous conseille aujourd’hui de m’abandonner. Or, si vous me faites défaut, je dois chercher secours ailleurs , et mettre votre fief en d’autres mains qui sauront mieux le défendre. — Nous vous entendons, » reprit Hardré, le Roi renonce au fief, à la vue de tous vos amis. — S’il est ainsi, je vous en remercie, » fait Hervis, « mais est-il bien vrai que vous le me quittiez ? Sire, je veux l’entendre de votre bouche. — C’est la vérité, » dit Pépin, «j’en prends à témoin saint Denis. »

Le Duc sortit aussitôt de Montloon, sans demander congé. Arrivé dans la nuit à Cambrai, il y trouva son cousin et leurs communs amis, auxquels il raconta comment Pépin avait refusé de le protéger contre les Païens. « Ne vous découragez pas, « dit Garin l’orphenin, « il faut sans retard mander nos amis et nos parents. — Oui, » répond Hervis, « mais d’abord je veux aller trouver Anséis ;