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PRÉLIMINAIRE

À venir jusqu’à il y a à peu près trois siècles une ignorance superstitieuse obscurcissait et paralysait l’intelligence des peuples. Les trois quarts du globe qu’ils habitent étaient inconnus ; ils ignoraient également la cause de la plupart des phénomènes naturels qui les ravissaient d’admiration ou les remplissaient de crainte ; les sciences les plus positives étaient enveloppées de pratiques mystérieuses ; le chimiste passait pour un devin ou sorcier, et souvent il finissait par se croire lui-même inspiré par les esprits.

L’invention de l’imprimerie et la découverte du Nouveau-Monde ébranlèrent, sur sa base vermoulue, cette divinité qui avait couvert le moyen âge de si épaisses ténèbres. Mais Colomb livrant l’Amérique à l’Europe étonnée, et dévoilant tout à coup une si grande portion du domaine de l’inconnu, lui porta peut-être le coup le plus funeste.

La liberté aussi, quoique perdue dans la barbarie universelle, ne s’était pas tout à fait éteinte dans quelques montagnes isolées ; elle contribua puissamment au mouvement des esprits. En effet, l’on peut dire que c’est elle qui l’inspira d’abord, et qui le soutint ensuite avec une force toujours croissante.

Depuis ce moment, la grande figure du peuple apparaît dans l’histoire moderne. Jusque-là, il semble un fond noir sur lequel se dessinent