Page:Garneau - Histoire du Canada depuis sa découverte jusqu'à nos jours, tome I, 1845.djvu/319

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
320
HISTOIRE

que les secrets du confessionnal devaient influer sur la conduite des ecclésiastiques vis-à-vis des justiciables qui tombaient dans leur disgrâce, et qu’ils ne pouvaient se soustraire à cette juridiction antique de l’Église qui juge et doit juger de l’acte par l’intention, et confond l’absolution avec la réhabilitation politique. Ainsi ces juges, au moyen de leur double tribunal, étaient selon eux, revêtus de deux pouvoirs redoutables qui s’aidaient l’un l’autre, et qui devaient causer un juste effroi aux habitans[1]. Pourrait-on concevoir, en effet, rien de plus exorbitant que la réunion de deux pouvoirs aussi essentiellement absolus que l’étaient alors le gouvernement politique et le gouvernement religieux du Canada, tous deux commandant la soumission la plus illimitée, l’un par la force et l’autre par la foi. Il n’en fallait pas tant pour exciter les soupçons du peuple. Mais heureusement que ce système était vu par la cour elle-même avec suspicion, et qu’elle n’attendait que le dévelopement de la colonie et une occasion favorable pour y mettre fin ; ce qui faisait que l’autorité de ceux qui étaient ainsi préposés pour rendre la justice n’étant pas avouée universellement, les jugemens qui intervenaient, demeuraient le plus souvent sans exécution.

  1. Talon : Mémoire sur l’état du Canada.