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HISTOIRE

on le promena longtemps autour de la ville comme si on eût circulé au milieu des chausses-trapes, des chevaux de frise et des retranchemens ; un bruit d’hommes, d’armes et de canons qu’il entendait ne fit qu’augmenter sa surprise, car les Anglais croyaient la ville désarmée et hors d’état de se défendre. Mais lorsque le bandeau tomba de ses yeux, et qu’il se vit en présence du gouverneur entouré des principaux personnages du pays, au milieu d’une salle remplie d’officiers, il présenta en tremblant sa sommation, dont les termes arrogans contrastaient singulièrement avec son air consterné, et révoltèrent tous les assistans, surtout M. de Varennes, qui ne put s’empêcher d’élever la voix dans l’assemblée et d’exprimer son indignation avec une franchise toute de soldat. L’amiral Phipps demandait en substance que le Canada et ses habitans se livrassent à sa discrétion, et qu’en bon chrétien il leur pardonnerait le passé. Le gouverneur, piqué du manque de convenances dans les paroles de cet amiral, répondit sur le même ton : « Je ne connais point, dit-il, le roi Guillaume, mais je sais que le prince d’Orange est un usurpateur, qui a violé les droits les plus sacrés du sang et de la religion en détrônant le roi son beau-père. Je ne connais pas d’autre souverain légitime que Jacques II. Quant