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HISTOIRE DU CANADA.

médecins au milieu des ravages du fléau qui venait de décimer le pays, l’assemblée jalouse de ses privilèges, protesta contre les attaques qu’elle avait cru voir dans les observations qu’il avait faites en prorogeant la dernière session. À peine avait-elle accompli ce qu’elle regardait comme un devoir, qu’elle reçut les vues du ministre sur le bill de subsides de la dernière session. À l’avenir le gouverneur ne pourrait en sanctionner aucun dans lequel on n’aurait pas spécifié avec précision la somme et l’objet pour lequel cette somme était accordée ; et comme le dénouement de la question de la liste civile équivalait à un rejet absolu, le roi n’amènerait plus cette question sur le tapis et continuerait à payer les dépenses sur les deniers que la loi avait mis à sa disposition. Quant au bill pour l’indépendance des juges, il n’avait pas été sanctionné parce qu’on n’avait pas fait d’appropriation fixe et permanente pour leur salaire, suivant l’usage de l’Angleterre d’autant plus nécessaire en Canada, disait lord Goderich, que la population y était divisée en deux classes, différant d’origine, de langue, de religion et de coutumes, et que la prépondérance de l’une dans l’assemblée excitait la jalousie de l’autre ailleurs.

Le refus de la proposition des ministres sur la question des subsides allait nous faire rétrograder au point d’où nous étions partis. Il était facile de voir que lord Goderich qui avait fait plus qu’aucun de ses prédécesseurs, comme nous l’avons dit, malgré les préjugés de l’Angleterre, allait être forcé de reconnaître que les Canadiens étaient insatiables et que leurs adversaires avaient raison de vouloir tenir dans l’abaissement des hommes si ambitieux.

Le retour du ministre à une politique rétrograde ou stationnaire, loin d’arrêter l’élan de l’assemblée, l’augmenta. Elle se vit inondée de pétitions de Montréal, des Deux-Montagnes, de l’Islet, de Richelieu, de St.-Hyacinthe, de Rouville, de Chambly et de Verchères, sur les abus de l’administration, les vices de la constitution et le 21 mai. Pendant ce temps là, elle faisait une enquête sur les événemens de cette funeste journée, interrogeait les témoins, recevait un refus du gouverneur de lui dire s’il avait recommandé d’augmenter le nombre des membres du conseil législatif, quelles personnes il avait recommandé d’y nommer et