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HISTOIRE DU CANADA

grossis de bouche en bouche augmentaient les espérances, lorsque les chambres s’ouvrirent le 27 octobre. Lord Gosford leur adressa un long discours, dans lequel il parla de beaucoup de choses, mais finit par déclarer que sur les grandes questions en débat la commission ferait son rapport à Londres, et que du reste les Canadiens pouvaient être assurés qu’on ne toucherait point à leurs arrangemens sociaux. C’était annoncer un nouvel ajournement. Mais comme il avait appuyé sur beaucoup de réformes de détail et que son discours, préparé avec soin, respirait la modération et la justice, on osa espérer encore. « Je dirais, observait-il, aux Canadiens tant d’origine française que d’origine britannique, considérez le bonheur dont vous pourriez jouir, et la situation favorable où, sans vos dissensions, vous pourriez vous placer. Issus des deux premières nations du monde, vous occupez un vaste et beau pays, un sol fertile, un climat salubre, et le plus grand fleuve du globe amène jusqu’à votre ville la plus éloignée les vaisseaux de la mer. »

La réponse au discours du trône provoqua quelques débats, sur un amendement de M. Clapham, qui voulait qu’on reconnût la commission ; mais la chambre s’y refusa, ne connaissant point les instructions qu’elle devait suivre. Le parti tory cherchait déjà à l’appuyer comme s’il les eut connues et s’il eût connu sa pensée. La réponse de la chambre ne fut qu’un écho du discours, interprété au point de vue des 92 résolutions. Lord Gosford fidèle au système qu’on lui avait tracé de tâcher de capter la bienveillance des Canadiens par ces égards qui touchent, répondit d’abord à la chambre en français, puis ensuite en anglais. La Gazette de Montréal se trouva offensée de cette courtoisie et de l’audace qu’avait eue un gouverneur anglais de faire usage de la langue du vaincu. C’était une concession coupable, le premier pas de la dégradation de la mère-patrie, qui avait eu la faiblesse de ne pas proscrire la langue française dès l’origine.

Les journaux anglais qui avaient eu le signal, faisaient les plus grandes menaces suivant le système qu’on leur avait indiqué, et que faisaient marcher des fils secrets qu’on tenait à Londres. L’association constitutionnelle de Montréal demanda à être entendue par la commission, qui l’informa que l’esprit de la constitution ne serait pas changé et que l’intérêt commercial serait protégé.