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Puis l’amiral Pelew, après avoir prononcé ces paroles avec âme, prie l’Hermite de s’appuyer sur son bras, et le conduit dans un magnifique appartement qu’il lui a fait préparer et qui est contigu au sien.

Je demanderai à présent au lecteur la permission de revenir à mon humble personne, restée à bord de la Preneuse.


XVIII

Ne désirant pas plus être fait prisonnier par les Anglais que brûlé vif, j’attendis que le cutter qui emportait l’Hermite fût éloigné de quelques brasses de la frégate ; me dépouillant alors de ma veste et de mes souliers, je m’affalai à la mer par le côté de bâbord. Comme j’étais excellent nageur, que l’eau était tiède et tranquille, la terre pas trop éloignée de moi, je ne me serais nullement préoccupé de ma position, sans une fort désagréable pensée qui me vint à l’esprit : celle que je pourrais bien rencontrer des requins. Or, je l’avoue, cette perspective m’épouvantait beaucoup : aussi ne fut-ce pas sans un vif plaisir que je me hâtai de grimper dans une embarcation qui cherchait les blessés et qui me recueillit.

Lorsque nous abordâmes sur la plage, je fus l’objet, quoique mon grade de simple matelot à bord de la Preneuse n’eût rien qui pût motiver une semblable réception, l’objet d’une véritable ovation. On m’entourait, on m’accablait d’offres de services : l’un me proposait sa maison, celui-ci de l’argent, celui-là des habits ; c’était à qui obtiendrait de moi une marque d’attention, une parole,