Page:Garneray - Voyages (Lebègue 1851).djvu/310

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il demandait. Seulement il fixa le terme de la conciliation à dix minutes !

Dix minutes, c’était beaucoup pour Surcouf, qui savait aborder si carrément de front les affaires. Elles lui suffirent, surtout en renchérissant de cinquante piastres les avances qu’il faisait, sur celles de Dutertre, pour lui gagner une quarantaine de matelots ; le reste des frères la Côte ayant demandé jusqu’au lendemain pour réfléchir.

Que l’on juge de la rage de ce dernier lorsqu’il apprit quelques heures après ce funeste événement. Il jura de s’en venger, et joignant aussitôt l’action à la parole, il fit annoncer immédiatement que, loin de chercher à diminuer la part des matelots par un luxe d’état-major comme celui de Surcouf, son état-major se composait de trente personnes ; il s’engageait à ne prendre qu’une douzaine d’officiers, le nombre strictement nécessaire pour conduire les prises et pour remplir le quart du bord. Qu’en outre, tout le monde à bord du Malartic, lui tout le premier, ainsi que les officiers, toucherait part de prise égale ! Cette annonce eut un succès prodigieux.

— Part égale ! répétaient les matelots avec enthousiasme. Vive Dutertre ! Faudrait-il pour nous embarquer avec lui déserter et aller ensuite en barques le rejoindre à la mer, nous le ferions !…

— Parbleu ! dit Surcouf, lorsque cette nouvelle lui revint, nous avons, Dutertre et moi, pris jusqu’à présent une mauvaise marche pour terminer ce débat. Un tête-à-tête de cinq minutes au Champ-de-Mars décidera bien mieux ce différend.

Dutertre, de son côté, se livrait à une réflexion tout à fait semblable, qu’il annonçait à ses amis.

Telles étaient les dispositions des deux capitaines à