Page:Garneray - Voyages (Lebègue 1851).djvu/345

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— Tout le monde sur le pont, hèle Surcouf du haut des barres, où il s’est élancé de nouveau, toutes voiles dehors !

Puis après un silence de quelques secondes :

— Du café, du rhum, du bishop. Faites rafraîchir l’équipage !… Branle-bas général de combat ! ajouta-t-il d’une voix éclatante.

— Branle-bas ! répète en chœur l’équipage avec un enthousiasme indescriptible.

Au commandement de Surcouf, le bastingage s’encombre de sacs et de hamacs, destinés à amortir la mitraille ; les coffres d’armes sont ouverts, les fanaux sourds éclairent de leurs lugubres rayons les soutes aux poudres ; les non-combattants, c’est-à-dire les interprètes, les médecins, les commissaires aux vivres, les domestiques, etc., se préparent à descendre pour approvisionner le tillac de poudre et de boulets, et à recevoir les blessés ; le chirurgien découvre, affreux cauchemar du marin, les instruments d’acier poli ; les panneaux se ferment ; les garde-feu, remplis de gargousses, arrivent à leurs pièces ; les écouvillons et les refouloirs se rangent aux pieds des servants, les bailles de combat s’emplissent d’eau, les boutefeux fument : enfin, toutes les chiques sont renouvelées, chacun est à son poste de combat !

Ces préparatifs terminés, on déjeune. Les rafraîchissements accordés par Surcouf font merveille ; c’est à qui placera un bon mot ; la plus vive gaîté règne à bord ; seulement cette gaîté a quelque chose de nerveux et de fébrile, on y sent l’excitation du combat !

Cependant le vaisseau ennemi, du moins on a mille raisons pour le présumer tel, grandit à vue d’œil et montre bientôt sa carène. On connaît alors sa force apparente, et la Confiance courant à contre-bord l’approche bravement sous un nuage de voiles.