Page:Garneray - Voyages (Lebègue 1851).djvu/358

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gagné sa gageure. Armé simplement d’une hache et d’un pistolet, il s’est affalé du haut de la grande vergue au beau milieu des Anglais, qui, stupéfaits de son audace, le laissent se frayer un sanglant passage à travers leur foule, et rejoindre, sur l’avant, l’escouade de Drieux, qu’il va seconder dans ses efforts.

Pendant que Drieux combat, Surcouf, avec cette lucidité d’esprit qui embrasse jusqu’aux moindres détails d’un ensemble, surveille et dirige la bataille.

— Allons donc, Avriot, allons donc, Guide, s’écrie-t-il, des grenades donc ! des grenades ! toujours des grenades !

— À l’instant, capitaine, répond le gabier Guide placé dans la hune de misaine, c’est que les deux lanceurs du bout de la vergue viennent d’être tués.

— Eh bien ! baptise les Anglais avec leurs cadavres, et venge-les, reprend Surcouf.

— Tout de suite, capitaine, dit le gabier Avriot.

Quelques secondes plus tard, la chute imprévue des deux cadavres, qui tombent lourdement au milieu de la masse des ennemis, opère une éclaircie momentanée dans leurs rangs.

— En avant, mes amis, s’écrie Drieux d’une voix de stentor, profitons de cette reculade.

La vergue de misaine de la Confiance, toujours posée près du plat-bord ennemi, et l’ancre de ce vaisseau, qui n’a pas quitté notre sabord de chasse, sont continuellement couvertes par nos matelots qui passent sur le Kent. Les Anglais ont beau foudroyer ce dangereux passage, quelques-uns de nos hommes tombent, mais pas un seul ne recule.

Bientôt, grâce à l’adresse de nos chasseurs bourboniens, au talent de nos bâtonistes, à l’enthousiasme de tout