Page:Garneray - Voyages (Lebègue 1851).djvu/357

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— C’est un fameux crampon auxiliaire ! s’écrie Surcouf en se jetant dans les enfléchures pour donner l’exemple.

Seulement notre équipage, trompé par le bruit effroyable, dans la position où nous nous trouvons, produit par ce déchirement, se persuade que le navire s’ouvre et va couler à fond. Ne voyant plus dès lors un moyen de salut que dans la prise du Kent, son ardeur s’accroît jusqu’au délire.

Drieux, officier aussi intrépide que capable, conduit son escouade d’abordage avec autant de valeur que de présence d’esprit. Il franchit bientôt l’intervalle qui sépare les deux navires, et, atteignant le gaillard d’avant, tombe impétueusement sur l’ennemi, qui, au reste, je dois l’avouer, fait bonne contenance.

Les officiers anglais, trahis par leurs brillants uniformes, commencent alors à tomber sous les balles infaillibles de nos chasseurs de Bourbon.

Un officier ennemi, au milieu de cette boucherie, de ce pêle-mêle général, braque une pièce de l’avant dans la batterie, de façon à pouvoir prendre la Confiance en écharpe, et y met le feu. Quelques matelots qui passaient sur les bras et la verge de l’ancre sont mutilés ou broyés, qu’importe : on les vengera.

Pour être juste et impartial, ce qui sera toujours mon plus vif désir, et pour rendre à chacun la part de gloire ou de faiblesse qui peut lui revenir, je dois reconnaître que Drieux n’est pas le premier homme de notre bord dont le pied foule le pont du Kent. Celui à qui était réservé le bonheur de se trouver avant tous en présence de l’ennemi est un simple nègre nommé Bambou.

Bambou avait parié ses parts de prise, avec ses camarades, qu’il serait le premier à bord du Kent, et il avait