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De Cavit, la Preneuse et le Brûle-Gueule allèrent relâcher à Batavia ; puis de Batavia, elles appareillèrent pour l’Île de France. Notre traversée fut heureuse et nous arrivâmes sans accident aucun en vue de l’île ; c’était à la tombée de la nuit. Le capitaine l’Hermite, n’apercevant aucun croiseur, dirigea la route de manière à attaquer le port Maurice au nord-ouest en passant sous le vent de la colonie.

Cependant, comme d’un instant à l’autre nous pouvions nous trouver en présence de l’ennemi, nous nous tenions sur nos gardes : nous fîmes bonne route toute la nuit.

Le soleil éclairait à peine encore l’horizon de ses premiers rayons, lorsque nous apprîmes, le lendemain matin, par les signaux du port, que la colonie était bloquée par une division anglaise, composée de deux vaisseaux de guerre, d’une frégate et d’une corvette.

Par bonheur, les navires ennemis se trouvant au large, nous pûmes gouverner vers le petit port de la rivière Noire ; seulement, pour gagner le fond de la baie, à peine abritée par deux petites pointes, il fallait louvoyer, et les Anglais, meilleurs marcheurs que nous, nous gagnaient main sur main. Notre perte semblait certaine. Heureusement que l’Hermite nous commandait, et qu’avec lui, je l’ai déjà dit, on pouvait toujours compter sur les ressources du génie uni au courage.

Le capitaine l’Hermite, qui connaissait la côte, et savait qu’il y avait assez d’eau pour nous, comprit tout de suite que l’ennemi placé sous le vent ne pouvait nous couper le chemin et qu’il lui devenait facile, sinon d’éviter quelques bordées anglaises, au moins de mettre ses deux navires en sûreté.

En effet, louvoyant bord sur bord, nous eûmes bientôt à endurer le feu ennemi, depuis onze heures du matin