Charles lut, sans grand étonnement :
Si vous voulez écouter les conseils d’une personne qui vous porte de l’intérêt, vous ferez bien de venir un soir à la Boule Plate ; vous verrez comment votre mari fait la cour à une roulure de café-concert qui le fera devenir zo-ot. Prenez garde. Il est en train de dépenser son argent pour elle et le vôtre aussi et il se moque de vous, comme d’une sardine derrière une malle. Mais dépêchez-vous, parce que, dans quelques jours, cette p… quitte Bruxelles.
Charles avait lu d’un coup d’œil. Mais il se donna l’air de déchiffrer difficilement, pour avoir le temps de réfléchir. Rose épiait son visage.
— C’est une lettre anonyme qui vaut ce que valent toutes les lettres anonymes, dit enfin Charles, en lui rendant le papier.
— Alors, vous ne savez de rien ?
— Je suis plus surpris que vous, Madame Rose.
Elle leva sur lui ses grands yeux purs. Et d’une voix grave, qui tout à coup se mouilla :
— Vous dites pas la vérité, Monsieur Charel ; c’est pour pas me faire de la peine ; eh bien, écoutez : vous avez tort ; je suis pas une femme qui embêterait son mari parce qu’il aurait une « bountje » pour une autre femme ; seulement je voudrais bien que vous me disiez oùs’ que ça en est, pour savoir qu’est-ce que je dois faire…