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Page:Garnir - À la Boule plate.djvu/204

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Julien dans leurs grosses pattes et lui disaient d’une voix sans accent :

— Voyons, monsieur Julien, voyons ; vous n’êtes plus un enfant, n’est-ce pas… Si vous toussez en ce moment, c’est que vous avez pris un rhume, comme tout le monde…

Ce fut dans les premiers jours de mars que, brusquement, il déclina, fondit, fut réduit à rien.

Il ne fut plus en quelques jours qu’un petit débris d’homme, des os massés dans une redingote et tassés dans l’angle du mur, sur le banc de la Boule Plate. Il faisait des rêves ; aux heures où un peu de bonne humeur gamine lui revenait, il disait, gelé jusqu’aux moëlles par cet interminable hiver, humide, glacial et pluvieux, un « hiver pourri », suivant l’expression des gens de campagne : « Je voudrais être singe dans une forêt vierge », ou : « Je voudrais être une grappe de raisin qui mûrit sur un coteau de l’Algérie ». Et sa longue main maigre, sa main pâle aux ongles bleuâtres et bombés, se tendait vers l’invisible Soleil, générateur de la Chaleur et de la Vie.

Les trois amis se consultèrent et décidèrent de l’engager à partir pour le Midi. Il refusa, mais, à leur grande surprise, il leur montra une correspondance qu’il échangeait depuis quinze jours avec le directeur d’un sanatorium de la Campine ; les conditions