Page:Garnir - À la Boule plate.djvu/70

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faciles et d’allures joyeuses et ces hommes presque tous jeunes et bien portants, ayant le goût violent de la femme, des intrigues s’ébauchaient, se nouaient ; il se produisait des rapprochements imprévus, tout de suite surpris, observés et commentés par la galerie : « Les amours sur le zinc ou les mystères de la Boule Plate », disait Julien Rousseau.

D’ailleurs, la « société » de la Boule Plate avait de certains côtés phalanstériens, notamment à raison de l’institution du Lit-à-Tous : le patron, possédant une chambre meublée dont il n’avait que faire, y hospitalisait, à l’occasion, le client qu’un motif imprévu privait de son gîte régulier.

Du moment où l’on était dûment agréé dans la bande Flagothier, on avait droit au Lit-à-Tous. Oh ! le plus honnête lit du monde, un lit de tout repos, une fleur de lit, disait Odon. Jamais ébats de couples n’égayèrent la blancheur sévère de ses draps ; jamais, pendant la journée, il n’était accessible ; il n’offrait son oreiller qu’au client surpris par un déménagement, ou bien au consommateur à qui le poids des demis ingurgités et leur fermentation faisaient un impérieux devoir de ne pas risquer imprudemment, par les rues, nocturnes et désertes, une démarche par trop titubante ; ou bien encore à l’habitué de qui la