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Page:Gaskell - Autour du sofa.djvu/123

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LADY LUDLOW.

— Si j’allais avec toi » répondit le gamin, je suis plus fort que maman, et je rapporterai mieux qu’elle un sac de… » Pierre m’a dit n’avoir jamais oublié le regard de son cousin, lorsque celui-ci, l’interrompant, lui ordonna d’obéir sans réplique.

Mme Babette, surprise et reconnaissante, alla rue Saint-Antoine, et revint deux heures après, chargée d’excellent café, mais l’air grave et la bouche close. C’était pour lui arracher le nom de Mlle Canne que son neveu l’avait attirée chez l’épicier ; non pas qu’il attachât d’importance à la famille de Virginie ; mais il voulait connaître ce fidèle et bon cousin dont il était question. Mme Babette refusa tout d’abord de lui répondre ; bien qu’elle ignorât le motif de sa curiosité, elle sentait vaguement que ce désir d’en savoir davantage au sujet de Virginie était de mauvais augure. Morin devint plus pressant : une fois marié il serait riche, son père lui donnerait la moitié de sa fortune, qui était considérable, et la tante ne serait pas oubliée ; on assurerait son avenir le jour même du mariage. Cependant Babette ne disait rien ; les menaces succédèrent aux promesses ; on la renverrait de l’hôtel, on la dénoncerait au comité de salut public pour avoir donné asile à une aristocrate ; la pauvre femme répondit vainement à son neveu que ce serait exposer à la mort la jeune fille qu’il aimait ; il finit par effrayer sa tante au point que Mme Babette avoua que Mlle Canne était la fille du comte de Courcy.

« Mais le comte avait un frère ?

— Assurément.

— Où est-il ?

— Mort depuis bien des années.

— Sans enfants ? »

La concierge hésita ; elle reprenait courage en songeant à la famille de ses anciens maîtres, et refusa de