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LADY LUDLOW.

moindre crainte au sujet de l’interprétation qu’on pouvait leur donner. Elle s’approcha du lit de repos où j’étais étendue, me baisa au front, et chercha ensuite les papiers dont elle avait besoin.

« J’ai parcouru hier matin les termes de Coningtone, milady, continua l’homme de loi, et j’ai été vivement peiné, je l’avoue, de la triste condition des terres ; tout ce qui n’est pas en friche est littéralement épuisé par les récoltes successives de froment qu’on y a faites ; et pas un atome d’engrais depuis plusieurs années ! La chose est d’autant plus frappante, qu’elle forme le plus grand contraste avec les champs voisins : là, une rotation intelligente, des palissades en bon état, des moutons parqués sur des terres où ils mangent des navets, en un mot, tout ce qu’on peut désirer en fait d’agriculture.

— Quelle est cette ferme ? demanda lady Ludlow.

— Je suis fâché d’avoir à le dire, mais elle n’appartient pas à Votre Seigneurie. Je l’avais espéré tout d’abord et je voulus m’en assurer ; un homme à l’air grotesque, montant à cheval comme un tailleur, et qui surveillait ses ouvriers avec une paire d’yeux les plus fins et les plus perçants qu’on puisse voir, répondit à ma question que cette ferme était à lui. Je ne pouvais pas lui demander son nom, mais j’appris en causant qu’il avait gagné quelque fortune dans le commerce, avait acheté cinq cents acres de terre, et consacrait tous ses instants à les faire valoir, après être allé à Holkham, à Woburn et dans tous les environs pour y apprendre les meilleurs procédés agricoles.

— Ce doit être Brooke, le dissident, l’ancien boulanger de Birmingham, répliqua Sa Seigneurie avec une excessive froideur. Je suis désolée de vous avoir retenu si longtemps, monsieur Smithsone, ajouta-t-elle, voici les lettres que vous désirez consulter. »