Aller au contenu

Page:Gaskell - Autour du sofa.djvu/20

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
16
AUTOUR DU SOFA.

« Tiens, dit ma mère en mettant le doigt sur ce passage, lis tout haut ces quelques lignes, afin que les enfants apprennent combien la réputation de leur père était grande, pour qu’une personne qui ne l’a jamais vu puisse en parler en ces termes. Cousin Richard ! comme Sa Seigneurie écrit bien ! Continue, Marguerite. »

Elle s’essuya les yeux et mit un doigt sur ses lèvres pour imposer silence à ma petite sœur Cécile, qui, ne pouvant pas comprendre l’importance de la lettre, commençait à jaser.

« Vous restez avec neuf enfants, écrivait milady ; j’en aurais également neuf si tous les miens vivaient encore ; mais je n’ai plus que mon Rudolph, qui est à présent lord Ludlow. Il est presque toujours à Londres, ou en voyage, et il est assez rare que je jouisse de sa présence ; mais j’ai pris avec moi au château d’Hanbury, que j’habite, six jeunes personnes bien nées que je considère comme mes filles, excepté que je ne leur permets pas un certain luxe de table et de toilette qui conviendrait à une position de fortune supérieure à celle de leurs familles. Ces jeunes personnes, qui sont toutes de condition, malgré leur peu de fortune, ne me quittent presque jamais, et je fais tous mes efforts pour remplir à leur égard les devoirs d’une femme chrétienne. L’une de ces jeunes filles est morte au mois d’avril, pendant une visite qu’elle faisait à ses parents ; voudriez-vous m’accorder la faveur de permettre à votre fille aînée de la remplacer auprès de moi. Je me charge de l’entretien de mes jeunes compagnes et leur donne tous les mois une petite somme comme argent de poche. Elles ont peu l’occasion de s’établir, Hanbury se trouvant fort loin d’une ville quelconque. Notre ecclésiastique est vieux et sourd, et mon régisseur est marié ; quant aux fermiers des environs, ils ne sont pas faits pour attirer les regards des jeunes filles placées