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Page:Gaskell - Autour du sofa.djvu/241

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LADY LUDLOW.

Et miss Galindo ! je me rappelle encore l’époque (il me semble que c’était hier) où elle n’était pour moi qu’un nom synonyme de bizarrerie ; plus tard, une vieille fille bavarde et affairée, et maintenant je la chérissais, au point d’être jalouse de Bessy.

Je n’ai jamais voulu occuper les autres de ma chétive personne ; autrement, je vous aurais dit tout ce que M. Gray avait fait pour moi pendant ces longues années de douleur où il me fallut accepter l’existence d’un invalide ; mais il était bon pour tout le monde, riche ou pauvre, depuis Sa Seigneurie jusqu’à la naine de miss Galindo ; et ce n’était pas de l’amour que je ressentais pour lui, mais du respect, surtout de la reconnaissance.

Le village avait également bien changé ; on ne voyait plus de groupes de jeunes gens rassemblés à la croisée des routes, à l’heure du jour où l’on doit travailler. Les enfants gardaient le silence à l’école, et se conduisaient bien mieux qu’à l’époque où j’allais dans le bourg faire les commissions de milady. Je ne sais vraiment pas à propos de quoi miss Galindo pouvait gronder ; cependant elle se portait si bien, et avait l’air si heureux, qu’elle devait avoir sa ration accoutumée de ce bienfaisant exercice.

Quelques jours avant mon départ d’Hanbury, la nouvelle du mariage du capitaine James avec la fille aînée de M. Brooke, se confirma de façon à ne plus pouvoir en douter. C’est le capitaine lui-même qui en fit part à milady ; bien plus, avec un courage qu’il avait gagné, je suppose, dans sa carrière maritime, il osa demander à Sa Seigneurie, la comtesse Ludlow, la permission de lui présenter sa future, la fille de ce boulanger anabaptiste !

Je me suis toujours félicitée de ne pas m’être trouvée là quand il exposa cette requête ; j’aurais été trop confuse