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Page:Gaskell - Autour du sofa.djvu/285

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LA DESTINÉE DES GRIFFITH.

principauté, aux environs d’Aberystwith. Il est rare que les frères sachent apprécier leurs sœurs ; mais, dans cette circonstance, Owen se rappela combien il avait été peu reconnaissant des bontés d’Augharad, et donna cours à ses regrets, que, par un besoin de contradiction égoïste, il exprima devant son père ; au point que celui-ci finit par être douloureusement blessé de l’entendre s’écrier sans cesse : « Que deviendrons-nous quand Augharad sera partie ! Comme on va s’ennuyer quand Augharad n’y sera plus ! »

Il est certain qu’après la noce et le départ des jeunes mariés, Owen et son père sentirent combien l’affectueuse Augharad leur manquait à tous les deux. Elle était si attentive et si douce ; elle remplissait, avec dévouement et sans bruit, tant de menues fonctions d’où dépendait leur bien-être quotidien, qu’ils ne savaient plus comment vivre. La maison avait perdu l’esprit vigilant qui faisait régner l’ordre et la paix dans ses murs ; les domestiques allaient et venaient, cherchant en vain qui pût les diriger. Plus de fleurs dans les vastes pièces du manoir, plus de goût dans l’arrangement des meubles ; le feu brûlait tristement dans les grandes cheminées, et s’éteignait au milieu d’un amas de cendres grises. Il en résulta qu’Owen retourna sans regret à Bangor, que sir Griffith s’en aperçut, et que, dans son égoïsme, il en ressentit une déception profonde.

Les lettres, à l’époque dont il s’agit ici, étaient une chose assez rare. Owen en recevait une habituellement pendant le semestre qui suivait les vacances, et, quelques mois après, il avait la visite de son père ; mais cette année s’écoula sans qu’il reçût ni lettre, ni visite, jusqu’au moment où, sur le point de retourner à Bodowen, un mot écrit à la hâte vint lui apprendre que son père était remarié.