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Page:Gaskell - Autour du sofa.djvu/291

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LA DESTINÉE DES GRIFFITH.

d’une manière frappante avec la froideur qu’il trouvait dans sa famille.

Un soir, Owen (il avait alors vingt-quatre ou vingt-cinq ans), fatigué d’avoir chassé depuis le matin dans les marécages de Clenneny, passa auprès de la petite auberge, dont la porte était ouverte. La lumière et la gaieté qui régnaient dans cette maison l’attirèrent, pauvre homme accablé de lassitude ; et, comme tant d’autres, malheureux du présent et inquiets du lendemain, il entra au cabaret pour souper dans un endroit où du moins on serait content de le voir. C’était jour de gala dans la petite hôtellerie. Quelques centaines de moutons destinés à l’Angleterre couvraient la route de chaque côté de la porte ; à l’intérieur, l’habile et joyeuse hôtesse, tout en allant et venant, prodiguait les saluts aux conducteurs de troupeaux qui venaient passer la nuit chez elle, donnait des ordres pour que leurs bêtes fussent parquées dans un champ voisin ; et dans l’intervalle, servait un repas de noce qui avait lieu dans la chambre du fond. C’était, comme on le voit, beaucoup de besogne pour la pauvre Martha ; mais son sourire n’en était ni moins gracieux, ni moins constant.

Lorsque le jeune squire eut fini de souper, « J’espère, lui dit-elle, que vous avez trouvé bon tout ce qu’on vous a servi, et que de manger vous a fait du bien. »

Puis elle lui annonça qu’on allait danser dans l’autre chambre, et que la harpe serait tenue par le fameux Édouard de Corwen.

Moitié pour complaire au désir que son hôtesse lui exprimait par cette annonce, moitié par désœuvrement, Owen Griffith suivit le passage qui conduisait à la salle en question, et s’appuya contre le mur, en dehors de la porte, dont les montants servaient de cadre à la scène animée qui se passait dans la pièce. La flamme rouge du