Page:Gaskell - Les Amoureux de Sylvia.djvu/79

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

avait bâti et dont le specksioneer était le héros. Molly riait d’un rire gauche, comprenant mieux la pensée de son amie que celle-ci ne pouvait se le figurer.

« Allons, allons, Sylvia n’est pas contente… Pour toi, néanmoins, cela vaut mieux, ma fillette… Si j’avais épousé Charley, il ne serait plus disponible, et je lui ai entendu annoncer, plus d’une fois, que tu deviendrais la plus jolie fille du pays… »

Molly, dans l’ivresse de son bonheur s’émancipait bien autrement qu’elle ne l’avait jamais fait, au moins par-devant mistress Robson à qui déplut souverainement ce laisser aller de langage :

« Sylvia, lui dit-elle très-sérieusement et en termes assez brefs, Sylvia ne songe pas au mariage… Elle ne se déplaît pas encore auprès de ses parents… Tous ces bavardages me conviennent peu… Restons-en là, je vous prie. »

Puis, lorsque Molly, — légèrement décontenancée, malgré toute son assurance, — eut pris congé de ses deux voisines, mistress Robson ne manqua pas cette occasion de railler amèrement sa mauvaise tenue, son bavardage inepte et sa vanité sotte, recommandant à sa fille de ne pas trop « se mêler » avec une pareille commère.

« Molly cependant n’a pas mauvais cœur, répondit Sylvia toute pensive… J’avais cru, seulement, qu’elle était engagée à Charley Kinraid.

— Ces filles-là s’engagent au premier homme venu, pourvu qu’il les épouse et les mette dans l’aisance, » répliqua Bell avec un profond mépris.