Page:Gaskell Craik - Trois histoires d amour.djvu/119

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

chez elle. Elle reprit ses anciennes habitudes de charité, la simple vie qu’elle menait naguères, et, bien que ses ressources fussent fort diminuées, au près et au loin, tout le monde rivalisait d’égards et de respect pour elle.

Mais madame Rochdale n’avait pas l’air heureux. Elle avait beaucoup vieilli, c’était décidément une femme âgée. Au lieu de la sérénité douce qui la caractérisait naguère, elle avait toujours l’air agité comme si elle attendait et qu’elle cherchât quelque chose qu’elle ne trouvait pas. Pendant bien des semaines après son installation dans sa nouvelle demeure, elle tressaillait lorsqu’on frappait à la porte, elle suivait des yeux les étrangers à cheval qui passaient devant sa fenêtre, comme si elle se disait — il viendra peut-être voir sa mère. Mais il ne vint pas, et, au bout de quelque temps, elle retrouva la dignité patiente d’une douleur sans espoir.

Bien des gens disaient, parce que le nom de Lemuel ne sortait jamais de ses lèvres, qu’elle nourrissait contre lui un ressentiment implacable. Je crois que ce n’était pas vrai. Elle aurait peut-être eu de la peine à lui pardonner ; la plupart des mères eussent eu de la peine à sa place ; mais quelle est la mère à laquelle le pardon soit impossible ?