Page:Gaskell Craik - Trois histoires d amour.djvu/12

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son fils Guillaume. Les deux mille et quelques cents francs déposés à la caisse d’épargne devaient s’accumuler au bénéfice de Thomas.

Lorsque la lecture fut finie, Anne Leigh garda un instant le silence, puis elle voulut parler seule à Samuel Orme. Ses fils passèrent dans l’arrière-cuisine et de là dans les champs, sans prendre garde aux tourbillons de neige. Les deux frères s’aimaient tendrement, bien que leur caractère différât profondément. Guillaume, l’aîné, ressemblait à son père : il était austère, réservé et d’une droiture scrupuleuse. Thomas, qui avait dix ans de moins, était doux et délicat comme une fille, d’apparence comme de caractère. Il s’était toujours attaché à sa mère et redoutait son père. Ils marchaient sans parler, car ils n’avaient coutume de s’entretenir que des faits et ne connaissaient guère les expressions plus compliquées qui dépeignent les sentiments.

Cependant leur mère avait saisi d’une main tremblante le bras de Samuel Orme.

— Samuel, je louerai la ferme, il faut la louer.

— Louer la ferme ! où a-t-elle donc la tête ?

— Oh ! Samuel, dit-elle, les yeux baignés de larmes, il faut que j’aille vivre à Manchester, il faut que je loue la ferme.