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laisseroient mourir ; quar j’ay veu qu’ils laissoient les berbis et prenoient et tuoient le pastour.

Merveilleusement est sachant beste et fausse plus que nulle beste en garder tous ses avantaiges, car il ne fuyra jamais trop fort, fors tant comme il en ara besoinh ; quar il vuelt touzjours estre en sa force et en son alayne ; quar chescun jour li est besoinh ; quar chescun qui le voit le crie et chasse. Quant on le chasse à force, il fuyra tout un jour se levriers ne li sont leissiés. Il se fait voulentiers prendre en aucun vilaige ou ruissel. Il se fait pou abayer, se non qu’il ne puisse aler avant.

Ils deviennent aucunefois enragiés, et quant ils mordent un homme, à peine en puet garir ; quar leur morsure est trop venimeuse, comme j’ay dit pour les crapaux qu’ils menjent, et d’autre part pour la maladie de la rage. Quant ils sont pleins ou malades, ils peissent de l’erbe, comme un chien, pour eulx vuider. Ils demeurent longuement sans mengier ; quar un lou demourra bien sans mengier vi jours ou plus. Quant la louve a ses chiaux, à peines fera mal près de là où elle ha ses chiauls, pour paour de les perdre. S’il vient à un parc de brebis, s’il a loysir, il les tuera toutes ansois qu’il en mange.

On les prent à force aux chiens, aux lévriers, aux laz et ès cordes ; mes s’il est priz en un laz ou en autres cordes, quelles qu’elles soient, il les coupe merveilleusement tost de ses dens, se on n’y est bien tost pour le tuer ; ès fosses, ès aguilles, ès haussepiez, ou à poudres venimeuses que on leur donne en la char ; et en autres manières. Aussi quant le bestiaill descent des montainhes l’hiver, ils descendent après, pour avoir leur vie. Ilz suyvent voulentiers gens d’armes pour les charoinhes du bestiaill ou des chevauls mors ou d’autres choses : ils hullent comme un chien ; et s’ils sont deux lous ils feront si grant noise que vous dirés qu’il y a plus de huit chiens ; et cela font ils quant il fet cler temps et serin, ou quant ils sont juenes lous qui n’ont pas encore passé leur an, ou quant l’en les apelle en ullant pour les encharner. Et grant paine si on les a encharnés demeurront là où ils aront mengié espicialment vieulx lous, au moins la