Aller au contenu

Page:Gaston Phoebus - La Chasse, J-Lavallee, 1854.djvu/248

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 192 —

povoit passer par dessus la souche qui estoit grant et haute. Et tantost qu’il heut passé la souche il revint arrière à l’eau. Et quant je vi cela qu’il ne povoit passer, j’apelay les chiens au bout de la grant souche si en assentirent et crièrent jusques là où il entra arrière en l’eaue. Einsi doit fere le bon veneur quant cest cas li avient. Et devez savoir que les chiens assentent trop mieulz d’un cerf qui fuyt amont l’eaue que d’un cerf qui fuyt aval l’eaue. Quar quant il fuyt aval l’eaue et que les chiens sont au dessus, l’eaue en aporte tout l’assentement du cerf aval devant eulz. Et quant les chiens sont au dessous de l’eaue et viennent amont, l’eaue qui vient aval leur aporte la humour du cerf qui fuyt amont. Tout einsi que les chiens chassent mieulx le nez au vent que ne font aval le vent. Et s’il avient que un cerf vienhe à un estanc ou vivier ou marez et le veneur vient chassant jusques à l’entrée de l’estanc, il doit geter ses brisées et fere einsi que j’ay dit qu’il doit fere quant le cerf vient à la rivière ; et doit tantost prendre autour de l’estanc à tous ses chiens pour veoir s’il en est sailli d’une part ou d’autre. Et si ses chiens ne le dressent, il puet bien penser qu’il s’est bainhé en l’estanc et refuit sur soy ; si le doit einsi requerir comme j’ay dit quant un cerf vient à la rivière. Touteffois il est bon qu’il ait aux estans des batiaus ; quar un cerf puet bien demourer dedans l’estanc s’il est grant ; espicialment s’il y a rosiauls ou canes et où on ne pourroit pas entrer dedans l’estanc sans vaissel. Et aussi se les chienz le noyent en l’estanc, il fault qu’il y ait des batiaus pour le tirier hors. Aussi dis je ès grosses rivières, quar on ne puet mie touzjours, ni toutes rivières passer à gué.

Des chiens comme j’ay dit sur devant sont les uns plus sages que les autres, einsi que d’un homme. Car cieulz chiens y ha que pour quant qu’ils heussent bon maistre ne seroyent jamès sages ; et tieuls qui seront sages en une saison. Toutes voyes le veneur les puet fere sages par celle manière : il meismes les doit donner à manger et les doit aprendre en menjant de fere lessier le pain ou prendre le et les tenir en amour et en