Une foule de congrégations et d’ordres religieux, composés souvent des fils et des filles des plus nobles maisons, se disputaient l’honneur de le servir. On peut mettre au défi l’homme le plus hostile de nommer une seule misère intellectuelle, physique ou morale qui n’ait eu son soulagement particulier et complètement gratuit dans une de nos institutions religieuses. Le pauvre était littéralement ce que le christianisme l’a fait, l’image vivante et vénérable du Dieu devenu pauvre pour le réhabiliter.
Arriva la Révolution de 1789. Digne fille de la Réforme, elle déclare dès le 4 novembre que tous les biens ecclésiastiques sont mis à la disposition de la nation. Le 13 février 1790 elle supprime tous les vœux monastiques ; le 1er mai 1792 elle chasse les religieux et les religieuses de leurs maisons ; le 4 août elle ordonne la vente de leurs biens, et, le 18, la vente des biens des congrégations séculières et des confréries. De ces biens, qu’en a fait la nation ? D’autres peut-être peuvent le dire. Tout ce que nous savons, c’est qu’ils n’ont aucunement tourné à l’avantage des pauvres en général. La preuve en est que leur nombre s’est augmenté dans une mesure qui dépasse beaucoup l’accroissement de la population. Tandis qu’en 1789 on ne comptait en France qu’un pauvre sur dix, on en compte aujourd’hui un sur sept.