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Nous avons la raison et nous avons la force.
Nous ne redoutons plus ni les ogres de Corse,
Ni ceux du Vatican. Et comme, avant l’été,
Le platane, grandi, dépouille son écorce,
De dessus notre corps nous avons rejeté
La gaîne étroite où Dieu serrait l’Humanité.


Réjouis-toi, Kaïn ; voici l’heure attendue.
La Justice, aux méchants ainsi qu’aux bons rendue,
Régnera seule ici. Voici le Justicier,
Le Peuple, dont la voix enfin est entendue,
Que ne peut plus surprendre un mensonge grossier,
Et qui tient en sa main l’incorruptible acier;

 
L’incorruptible acier, l’acier du glaive intègre
Qui frappe sans pitié le Mal, dont la voix aigre
Excelle à s’adoucir en paroles de miel.
Ta race à l’Avenir marche d’un pas allègre,
Ô Père qu’Iaveh, par jeu, nourrit de fiel,
Et dont le front frappé menace encor le ciel.


Demain, ton jour luira, Kaïn, grande victime.
Le coupable sera seul puni pour le crime
Auquel il employa le bras de l’innocent.
Nul ne prostituera désormais son estime,
En la livrant, par crainte, au superbe, au puissant,
Dont le lit est baigné d’une mare de sang.